Séminaire: La tentation de la violence dans les luttes écologistes.

Note de cadrage du séminaire organisé autour du thème « Paradoxes de l’action stratégique écologiste contemporaine » à AgroParisTech 25 janvier 2024.

Organisateurs:

Le séminaire implique les partenaires suivants : Laboratoire Printemps ; Groupe de Recherche sur l’Écologie Politique (GREP), Association française de science politique ; Agir pour l’environnement ; L’instant d’après et des formations SPES et GTES Paris-Saclay et de l’UFR Gestion du Vivant et Stratégies Patrimoniales.

De nombreux mouvements écologistes se sont historiquement prononcés pour la non-violence dans l’action militante, au nom de l’efficacité ou des valeurs. Désormais, certains mouvements militants interrogent le récit pacifié de la transition écologique et revendiquent une diversité des tactiques.
Sans renoncer à la non-violence, on voit ainsi s’affirmer l’idée d’une extension des formes d’action directe plus offensives, dans une visée stratégique de changement social. Ce choix s’associe souvent à la figure du guerrier et de la légitime défense et véhicule l’idée que les pirates obtiennent des résultats concrets sans formalité bureaucratique.
Ce phénomène prendrait une ampleur croissante et confronterait les systèmes démocratiques à une situation inédite de tensions politiques autour des modalités de gestion de la crise environnementale.
Dans ce contexte ce séminaire propose de traiter des rapports entre “écologie radicale” et démocratie.
Il examinera des logiques complexes entre les différents acteurs et leur statut, les effets rétroactifs des actions directes, les justifications de leur usage et de leur dissimulation, l’inscription dans des socio-histoires et des traditions. L’analyse de ces éléments vise à comprendre le sens et le processus d’évolution des répertoires d’actions des mouvements écologistes face à l’urgence environnementale ainsi que d’éclaircir le rapport qu’entretiennent certaines pratiques comme la désobéissance civile avec la question de la violence.
Il apparaît en effet que c’est cette question de la violence qui cristallise les tensions et occupe la place centrale du débat politique autour de l’activisme écologiste : désobéissance civile pacifiste nécessaire pour les uns, illégalisme violent à réprimer pour les autres.

De la violence écocidaire de l’Anthropocène à la violence de l’action directe illégale entraînant la judiciarisation et la répression d’un “écoterrorisme”, les nouvelles formes de l’écologie politique semblent être confrontées à nombres de paradoxes qu’il est nécessaire de penser. Cette journée se veut un dialogue entre des acteur·e·s emblématiques de l’activisme écologistes, des étudiant·e·s issus de différents cursus de Agroparistech et des chercheur·es spécialisées face aux enjeux politiques des ruptures écologiques en cours. En donnant la parole aux premier·e·s concerné·e·s, cette journée d’étude espère une sortie de l’imaginaire en exposant les récits de ces acteur·e·s qui s’articuleront autour de trois axes : 1) les raisons de l’engagement et le franchissement de la frontière de l’illégalité, 2) la vie sur le terrain des actions, 3) les effets des actions directes entre changements politiques et difficultés des conséquences.

Participant.e.s:

Les soulèvements de la Terre • Léna Lazare + invité·e·s ; Kevin + Pierre Douillard Lefevre (sociologue) • Bassines Non Merci • Julien Leguet et Jean-Jacques Guillet • SeaShepherd France • Lamya Essemlali • Animallst • Vincent Aubry • Aternatiba et ANV-COP21 • Jon Palais

Programme de la journée:

Interventions de cadrage – 9h30-12h30

  1. Ouverture. Bruno Villalba, prof de science politique, AgroParisTech, directeur du master GTES, Printemps, « Frontières de la violence ».
  2. Jon Palais, Aternatiba et ANV-COP21, auteur de La bataille du siècle, Les Liens qui Libèrent, 2023. « Les limites de l’action violente ».
  3. Margaux Arraitz, doctorante Abies, Printemps et David Porchon, doctorant Abies, Printemps, SPES : « Conflictualité, radicalité, violence… Répertoires et registres argumentatifs. Entre justification et juridicisation ».
  4. Table-ronde : présentations des acteur·trices participants aux ateliers de l’après-midi, Ateliers thématiques.

14h-16h:

  1. Pratiques de désarmements et légitimité politique. Méga-bassines : Bâche par bâche, grille par grille… Animation : Annie Le Fur (L’instant d’après) et Romain Cazaux (Doctorant EHESS) Collectif : Bassine Non Merci Intervenants : Julien Leguet et Jean-Jacques Guillet Objectif : Décrire le processus menant aux pratiques de sabotages, leurs effets sur les agriculteurs irrigants, les conséquences répressives sur les militants, le retour rétro-actif de la violence/vengeance (passage à tabac de militant, menace de mort, attaque de maison…). Quels sont les conditions d’émergences et les effets des pratiques de désarmements ?
  2. Loi spéciste et contre-violence antispéciste Animation : Romane Soler (doctorante Dysolab, GREP AFSP) Nolwenn Veillard (doctorante Arènes) Collectif : Animal1st Intervenants : Vincent Aubry Objectif : Souligner les spécificités d’une lutte pour les non-humains. Entre sacrifice identificatoire (hameçonnage, marquage au fer rouge) et libération des animaux prisonniers, paradoxes de la violence et confrontation à la cellule Démeter : un dialogue avec les spécistes est-il possible ?
  3. Judiciarisation ou criminalisation ? Animation : David Porchon (doctorant AgroparisTech/Printemps) Intervenants : Kevin+ invité.es, discussion avec Pierre Douillard Lefevre, chercheur en science sociale, spécialiste du maintien de l’ordre, auteur du livre « Nous sommes en guerre ». Objectif : Présentation des outils répressifs et législatifs, ainsi que des pratiques en cours en France face aux actions directes des écologistes. De la Zad de NDDL à Sainte Soline, à l’affaire Lafarge ou encore aux pratiques de dissolution administratives, quels sont les effets et les impasses d’une régulation par la voie répressive ?
  4. Sommes-nous tous des éco-terroristes ? Complémentarité des tactiques et acceptation de l’action offensive Animation : Margaux Arraitz (doctorante, AgroParisTech/Printemps, GREP AFSP) Collectif : Les Soulèvement de la Terre Intervenantes : Léna Lazare et invité.es Objectif : Présentation de la complémentarité des tactiques et de ses effets sur les millitant.es et leurs adversaires. De l’affrontement avec les forces de l’ordre au sabotage, le mouvement écologiste est-il toujours non-violent ? Quels sont les effets de la « composition » sur les récits politiques des luttes écologistes ? Atelier de restitution.

16h-17h :

Travail de production de fiches évaluatives par les étudiant·es de SPES et GTES. Présentation des résultats des évaluations • 17h15 Table ronde finale avec les intervenant·es.